dimanche 7 mars 2010

A Clipperton, un chimiquier en rade sur le récif

C'est une course contre la montre et le mauvais temps qui se joue actuellement sur un minuscule bout de terre française inhabitée, l'îlot de Clipperton, dans le Pacifique, à près de 1 300 km des côtes mexicaines. Un combat pour éviter une catastrophe écologique qui mettrait à mal ce joyau de biodiversité, que se partagent des millions de crabes orangés et une colonie - la plus importante du monde - de 100 000 fous masqués.

Depuis le 10 février, le Sichem Osprey, un chimiquier de 170 mètres de long, est échoué sur le platier corallien de l'île. Plus de la moitié de sa coque est posée sur le fond. Dans ses soutes, 6 000 tonnes d'huile de soja, 6 000 tonnes de suif et 10 500 tonnes de xylène, un solvant toxique, volatil et inflammable. Les premières tentatives de remorquage n'ont rien donné. Trop lourd, trop encastré.

Mercredi 3 mars, les équipes de sauvetage ont donc décidé de pomper une partie de la cargaison pour alléger le géant des mers. En commençant par le moins dangereux : l'huile de soja. Sans toucher pour le moment au xylène, trop délicat à manipuler. Quand la houle forcit, elle empêche en effet le Glenn, le navire-citerne dépêché sur place de se mettre à couple et d'aspirer la cargaison du Sichem Osprey. Mais les opérations progressent et la libération du navire ne serait plus qu'une question d'heures, ou d'un ou deux jours. A condition que la météo reste clémente. Une tempête pourrait tout ruiner.

Quelle que soit l'issue de l'opération, cet échouement - terme de marine qui décrit un acte involontaire, contrairement à l'échouage - restera gravé dans les annales de la mer. Le Sichem Osprey n'est pas un navire poubelle. Il a été construit en 2009. Son armateur est anglais, son pavillon maltais et son propriétaire, Eitzen Chemical Private Limited, est la filiale singapourienne du groupe norvégien Eitzen, à la "réputation tout à fait respectable", indique un expert français.

NÉGLIGENCE HUMAINE

La double coque du navire est restée intacte en dépit du choc. Mais comment un tel bâtiment a-t-il pu foncer à 16 noeuds (30 km/heure, sa vitesse de croisière) sur Clipperton alors que l'îlot, grâce à la roche de 30 mètres de haut qui le domine, est visible sur tout écran radar un peu moderne ?

La collision a eu lieu à 4 heures du matin. Même si les conclusions de l'information judiciaire ouverte par le parquet de Paris pour "mise en danger de la vie d'autrui et infractions au code de la marine marchande" ne sont pas encore connues, la négligence humaine semble l'hypothèse la plus probable : endormissement ? Défaut de surveillance radar ?

L'homme de quart parmi les dix-neuf membres d'équipage (des Russes, des Lettons et des Philippins) n'a pas tenu son poste. "Cette histoire est typique du paysage maritime actuel. Armateurs et propriétaires rognent sur les coûts, recrutant des équipages bon marché, dont la maîtrise de la navigation laisse à désirer", constate un officier de marine français.

Point positif, néanmoins : désireux de récupérer son bateau neuf au plus vite et dans le meilleur état possible, la compagnie Eitzen n'a pas lésiné sur les moyens (remorqueurs, navire-citerne...) envoyés sur place. Les opérations, à sa charge, se font sous l'autorité du Haut-Commissariat de Polynésie, dont dépend Clipperton. Le gouvernement français, inquiet des répercussions d'un désastre écologique, joue la fermeté. Il a "sommé" le groupe norvégien de désenclaver son navire d'ici au 15 mars, pour reprendre sa route vers la Corée-du-Sud et abandonner Clipperton à sa faune et à sa flore.

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