dimanche 7 mars 2010

Le poids de nos gènes bactériens


Peu à peu, le voile se lève sur notre flore intestinale. Indispensables à de nombreuses fonctions, ces bactéries totalisent 150 fois plus de gènes que n'en compte le génome humain. Un total d'un millier d'espèces bactériennes seraient présentes en grande quantité dans l'intestin humain. Chaque individu en héberge au moins 160, selon les premiers résultats du projet international MetaHIT, publiés jeudi 4 mars dans la revue Nature.

Cette flore bactérienne intestinale joue un rôle important dans la physiologie et la nutrition humaine, en particulier en extrayant du bol alimentaire les calories indispensables à répondre à nos besoins énergétiques. Divers travaux scientifiques ont montré que les modifications de l'équilibre entre différentes populations bactériennes constituaient un facteur d'obésité (Le Monde du 22 décembre 2006) et que la flore intestinale était impliquée dans des maladies inflammatoires de l'intestin.

Les bactéries que nous hébergeons en permanence sont dix fois plus nombreuses que nos propres cellules. L'ensemble des gènes humains et des gènes de la flore bactérienne présente dans l'intestin constitue le métagénome. Notre matériel génétique ne représente que 1 % du total.

MetaHIT ("Metagenomics of the Human Intestinal Tract ", Métagénomique du tractus intestinal de l'homme) est un consortium international mis sur pied en 2008 pour "établir des associations entre les gènes des bactéries de la flore intestinale humaine et notre santé et nos maladies". Il réunit des chercheurs européens, notamment de l'Institut de la recherche agronomique (INRA) de Jouy-en-Josas et du Genoscope à Evry, mais aussi chinois (Institut de recherche sur le génome, Shenzhen).

Dans ce cadre, les chercheurs du consortium ont séquencé, assemblé et analysé quelque 3,3 millions de gènes microbiens différents, provenant de bactéries présentes dans les échantillons de selles de 124 individus danois et espagnols. Parmi ces adultes, figuraient des individus en bonne santé, des personnes en surpoids, des obèses, ainsi que des sujets présentant une maladie inflammatoire de l'intestin.

Noyau fonctionnel

"Ce catalogue de gènes contient virtuellement tous les gènes de la flore intestinale dans notre cohorte ; il fournit une vue d'ensemble des fonctions importantes de la vie bactérienne et indique que de nombreuses espèces bactériennes sont communes aux différents individus", résument les auteurs. Ils ont identifié 75 espèces communes à plus de 50 % des individus et 57 espèces communes à plus de 90 % des sujets. Ces chiffres devraient augmenter à mesure que d'autres souches bactériennes seront séquencées.

D'ores et déjà, le travail publié dans Nature décrit parmi les bactéries de la flore 30 % de catégories fonctionnelles en plus par rapport à des publications précédentes. Les chercheurs ont cerné un "métagénome intestinal humain minimum" constituant le noyau fonctionnel retrouvé dans de nombreuses espèces bactériennes et probablement indispensable à leur vie dans l'écosystème intestinal. Ce noyau est d'une taille sept fois supérieure à ce qui avait été décrit auparavant.

Parmi les fonctions essentielles en figurent d'importantes pour les interactions entre la bactérie et l'hôte : dégradation des polysaccharides complexes, synthèse des acides gras à chaîne courte, des acides aminés essentiels et des vitamines. D'autres fonctions demeurent inconnues à ce jour et devraient faire l'objet d'autres études.

Le catalogue de gènes établi par MetaHIT "rend possible de futures études d'association entre les gènes microbiens et les phénotypes humains et, plus globalement, les habitudes de vie humaine, en prenant en compte l'environnement, y compris le régime alimentaire, de la naissance à la vieillesse", concluent les auteurs. La recherche sur les liens entre flore intestinale et pathologies humaines, à commencer par l'obésité, est décidément très active. Le site de la revue américaine Science publie, mercredi 3 mars, l'article de Matam Vijay-Kumar (université Emory, Atlanta) et ses collègues sur les anomalies constatées chez des souris dépourvues d'un certain type de récepteur impliqué dans le système immunitaire.

Ce récepteur, dit "Toll-like 5" (TLR5), est exprimé dans la muqueuse intestinale et participe à la défense contre l'infection. Les souris chez lesquelles ce récepteur est déficient présentent un comportement boulimique et développent les caractéristiques du syndrome métabolique : hyperlipidémie, hypertension artérielle, résistance à l'insuline et accroissement de l'adiposité. La restriction alimentaire chez ces souris a empêché le développement d'une obésité mais pas celle d'une insulinorésistance.

Ces modifications étaient corrélées à la composition de la flore microbienne : l'équipe américaine a transféré la flore intestinale des souris déficientes en récepteur TLR5 à des souris normales. Celles-ci ont alors développé la plupart des éléments du syndrome métabolique. Un argument de poids en faveur du rôle que les anomalies du système immunitaire inné jouent dans le développement du syndrome métabolique.

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